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lundi 31 décembre 2018

Rennes, piscine municipale Saint-Georges, rue Gambetta et Halle centrale, boulevard de la Liberté rue de Nemours place Honoré - Céramiques Gentil & Bourdet - Architecte Emmanuel Le Ray - 1923/1926

En septembre dernier, alors que l’automne commençait à s'installer, une ancienne collègue et amie, m'a préparé une visite des céramiques Odorico et Gentil&Bourdet, à Rennes. J'ai passé une délicieuse journée, à parcourir la ville, allant de découverte en découverte, marchant des kilomètres et nous arrêtant que pour déjeuner, d'un morceau de pain et de pâté de campagne, achetés sur le marché et arrosés d'une bonne bière locale.
J'avais déjà visité la ville, grâce à la même amie, il y a 7 ans et j'y avais découvert quelques petits éléments art nouveau. Cela avait été ma première rencontre avec les céramiques Odorico et la première fois également que j'avais entendu parler de Gentil & Bourdet, dont plus tard, je connaîtrais un des descendants. J'en étais également au tout début de ce blog. Que de chemin parcouru depuis !

Je reviendrai sur les céramiques Odorico dans un autre article. Aujourd'hui, je souhaite parler de celles de Gentil & Bourdet, présentes aussi bien sur la façade de la piscine que sur celles de la Halle Centrale (et à l'intérieur)

 Piscine municipale Saint-Georges

La construction qui abrite la piscine ressemble plus à une gare ou à une halle, vue de l'extérieur, qu'à un centre thermal. Son architecte, Emmanuel Le Ray, est également l'auteur de grand nombre d'édifices publics de la ville, dont la Halle Centrale. Son style est loin de l'Art Nouveau, mais les décors céramiques s'y rattachent ainsi qu'à l'Art Déco. 


Le bâtiment est réalisé en béton armé, en pierre de granit gris et en briques couleur terre, agrémentée de décorations de grès flammé.
Les motifs céramiques sont quasiment tous liés à l'eau, aussi bien sur l'arche centrale qui surmonte la grande baie vitrée, avec inscrit "piscine municipale", que sur les deux tours latérales, où un visage féminin, apporte une petite touche Art Nouveau.




A mes yeux, le plus spectaculaire reste le porche d'entrée, en fer à cheval, avec une voûte décorée de tournesols en mosaïque, qui entoure une belle porte bleue en fer forgé, style Art Déco, reproduisant des motifs aquatiques et floraux.
Mise à jour mai 2023: grâce à un message de son petit-fils, je connais le nom du réalisateur de la grille en fer forgé; C'est Théodore Brand, ferronnier d’art à Rennes, qui a également créé les grilles du crédit lyonnais de la ville en 1924



Halle Centrale

Commencé en 1913, la Première Guerre Mondiale en a interrompu la construction, qui s'est finalement terminée entre 1923 et 1926. Il s'agit d'une Halle au poisson, comme l'indique la mosaïque en frontispice indiquant "La Criée", oeuvre d'Odorico. 

ODORICO
Toutes les autres céramiques, y compris celles des étalages, sont de Gentil & Bourdet.


Dans le catalogue de céramiques G&B, que je possède, se trouve une représentation des Halles où il est possible de bien apprécier le décor en céramiques de grès, aujourd'hui souvent occulté par différentes éléments.


 De chaque côté, se trouve une fontaine, avec une tête de triton, d'où ne coule malheureusement plus aucune eau. Le modèle est également présent, sous le n° 842, dans le catalogue G&B.



A l'extérieur, de nombreux motifs allusifs à l'eau et à la mer, en grès flammé bleu, décorent le murs.



samedi 29 décembre 2018

« Le Temple du Moi », Villa Khnopff, 41 Avenue des Courses, Ixelles , architecte Edouard Pelseneer - 1900/02-, dans l'exposition Fernand Khnopff : Le maître de l’énigme du 11 décembre 2018 au 17 mars 2019 au Petit Palais, Paris

Hier, jour de mon anniversaire, j'ai vu l’exposition consacrée à mon peintre préféré: Fernand Khnopff. 

Il y a 40 ans, jeune étudiante en Histoire de l'Art et Archéologie, fraîchement arrivée à Paris, je découvrais l’exposition la plus merveilleuse et envoûtante qu'il m'ait jamais été donné de voir et de vivre de toute ma vie. Organisée par le Musée des Arts Décoratifs et dédiée à Fernand Khnopff. elle reprenait le décor et l’atmosphère de sa maison atelier "qui essaie de dissoudre silencieusement la frontière entre réel et rêve ".J'en ai gardé un souvenir resté intact toutes ces années, dont j'ai souvent parlé comme d'une expérience muséale absolument unique et que j'ai retrouvée, mais en bien moindre mesure dans cette nouvelle exposition organisée au Petit Palais. Dans la première, chaque salle avait un bouquet de fleurs et était parfumée à l’encens, une musique wagnérienne était diffusée en sourdine: tout était feutré, calme. C'était une récréation claire de l'univers de l'artiste et du parcours symbolique de sa demeure. Dans l'expositions actuelle, l'idée de nous faire entrer dans l'univers de Khnopff, non seulement à travers ses œuvres, mais également grâce à une allégorie de sa maison atelier, est bien présente, mais, à mon sens, pas aussi bien réussie et moins fascinante. J'y ai cependant découvert des éléments absents de la première rétrospective, liés à l'architecture et plans de sa demeure.

Dès le départ, sommes accueilli.e.s par une immense reproduction du tableau " Portrait de Marguerite Khnopff " (sœur et muse de l'artiste), datant de 1887, qui s'intègre à merveille dans le décor du Petit Palais.


L'exposition à proprement parler, commence par un portail en fer forgé, typiquement Art Nouveau. Il s'agit de al reproduction de celui qui ouvrait sur le petit jardin entourant la maison que Khnopff avait fait bâtir au 41, avenue des Courses, à Ixelles, Bruxelles, entre 1900 et 1902. La façade de la maison, s'ornait un petit oculus décoré d'un monogramme, en fer forgé, avec ses initiales. L'architecte, Edouard Pelseneer, est l'auteur de la maison des Hiboux (1895), qui fascinait l'artiste symboliste. Malheureusement, même pas 40 ans après sa construction, elle a été détruite en 1938, suite à des problèmes de succession.



L’exposition me semble essayer de suivre un parcours à la fois chronologique et thématique, puisqu'elle débute avec les paysages du Fosset, propres des vacances familiales à Bruxelles, tout en entremêlant des sujets, obsessions, techniques propres à son oeuvre (comme les portraits, la figure omniprésente de sa sœur, l'utilisation de la photographie, la sculpture, ses contacts, avec les préraphaélites, ...) et mettant l'ensemble en scène, dans un décor qui rappelle celui de sa maison-atelier, avec une prédominance du bleu indigo, du noir et du doré. Nous y pénétrons, du reste, par le portail décrit ci-dessus et entrons immédiatement dans une salle où trône, sur la gauche une étrange composition, décrite par Hélène Laillet, visiteuse de la demeure, dans une publication datant de 1912 "Si vous êtes assez chanceux pour être admis à l'intérieur, le serviteur ouvre silencieusement la porte et vous montre une antichambre entièrement décorée en blanc, avec des murs de stuc poli. Dans une position de fierté, un superbe paon indien empaillé surveille l'endroit du coin de son œil : il est le gardien de cette hautaine et austère demeure ". 


Dommage que cela résulte en un itinéraire quelque peu confus, pour qui ne connait pas l'oeuvre de Khnopff, ce qui doit être le cas, tout de même, d'un très grand nombre de personnes. Moi-même, j'ai eu un peu de mal à m'y retrouver voyant, par exemple, tout à coup, surgir une oeuvre contemporaine (en demeurant magnifique): une photographie indigo de Hiroshi Sugimoto. 


Ou en découvrant des œuvres d'autres artistes symboliques, comme une sculpture de Franz von Stuck qui appartenait à Knopff, ou des fac-similés des écrivains Joséphin Péladan ( fondateur de l'ordre kabbalistique de la Rose-Croix) ou de Pol de Mont, ou des oeuvres d'artistes préraphaélites, présentées de manière peu claire et obligeant à la lecture de fiches, pour essayer de comprendre les liens entre les uns et les autres. 

 Afin de rappeler les diffuseurs de parfum présents dans sa maison-atelier, sans recréer la poésie et la beauté des somptueux bouquets de fleurs de l'exposition de 1979, quatre bornes audio-olfactives, ont été installées, mais peuvent parfaitement passer inaperçues (de fait, j'ai vu très peu de personnes s'y intéresser). Grâce à elles, il est possible, après avoir appuyé sur un bouton, de sentir  un  parfum  et  d'entendre, simultanément,  une  musique  et  un  poème contemporains des œuvres.



Au milieu de l'exposition, un « salon symboliste » avec la possibilité de feuilleter des livres sur Fernand Khnopff, le symbolisme et d'autres thématiques de l'époque, accueille également les personnes qui souhaitent reproduire certaines de ses œuvres. 



Khnopff, artiste complet, était également critique d'art, poète, sculpteur et a réalisé lui-même les encadrements de nombre de ses tableaux. 


En ce sens, son oeuvre me semble très liée à l'Art Nouveau, non seulement par sa maison-atelier, mais également par son univers. J'attends de découvrir de nouvelles expositions et des études, analysant les nombreuses relations entre Symbolisme et Art Nouveau. 

samedi 22 décembre 2018

Maison Lamourelle, angle avenue Pierre Sémard et rue Emile Zola, Carcassonne - architecte Léon Vassas - 1911

Tout le monde connaît la prestigieuse cité médiévale de Carcassonne. Personne n'imaginerait que la ville recèle quelques exemples d'architecture Art Nouveau, dont la Maison Lamourelle, située en bordure du canal du Midi. 


Je me suis rendue dans la ville, la semaine dernière et dès mon arrivée, à bord d'un taxi, j'ai découvert cette construction. Au départ, je savais uniquement qu'elle est appelée familièrement "le champignon", par les habitants de la ville. C'est mon voisin de blog et ami, Valenti, qui m'en a donné les premières informations. Grâce à ces premiers éléments, j'ai pu faire des recherches et reconstituer peu à peu, l'histoire de cette bâtisse imposante, imbriquée dans celle de la Carcassonne du début du XXè siècle. 


A la fin du XIXè siècle, prospère dans la ville, une entreprise de récupération de chiffons, propriété de Raymond Sarraute, oncle d'Alphonse Lamourelle, qui reprendra la société, par la suite. De nombreuses femmes, de tout âge (de 12 à 65 ans), y travaillent,  dans de très dures conditions et dans l'insalubrité. 

Sortie des usines Lamourelle,
 spécialisées dans la récupération et le tri des chiffons,
à Carcassonne en 1902 - Collection Cuin - 

En 1894, il l'installe sur la rive gauche du Canal, non loin de la gare. Et, probablement vers 1911, ayant fait fortune, il fait appel aux services de Léon Vassas, architecte des Monuments historiques et diocésains, originaire de Montpellier, nommé surveillant local des travaux diocésains de Carcassonne fin 1900. 
Il est probable qu'Alphonse Lamourelle, travaillant dans le textile, ait eu connaissance des bâtiments Art Nouveau parisiens, dont beaucoup, ont été commandités par des propriétaires d'industries textiles et qu'il ait voulu construire sa demeure dans ce style. Il a peut-être également visité, des villes italiennes où cette industrie se développe à la même époque, comme à Lucca, en Toscane, car la villa en présente certaines caractéristiques, dont des décorations florales peintes, en haut des murs extérieurs, juste sous les toitures et une tourelle avec un toit circulaire, qui lui vaut le nom de "champignon". 



L’édifice est construit en briques beiges et en pierre du même ton, utilisée notamment pour les bases et entourages des ouvertures, ainsi que la magnifique console du balcon de l'étage supérieur, qui se poursuit jusqu'à toucher la fenêtre principale trilobée du rez-de-chaussée. 

Les ferronneries du balcon et de la porte cochère sont également dans l'esprit Art Nouveau, avec des motifs floraux et en coup de fouet.

samedi 1 décembre 2018

Intérieur de la Casa Comalat, Avinguda Diagonal, 442, Barcelone - architecte Salvador Valeri i Popurull (1909-1911), céramiste Lluis Brù i Salelles, vitraux Rigalt Granell i Cia

Il y a 6 ans, lors de ma première visite à Barcelone, presque 40 ans après mon départ, enfant, j'ai découvert émerveillée, la façade principale de la Casa Comalat et quelques mois plus tard celle, arrière, encore plus féerique
Il y a un mois, j'ai pu visiter l'intérieur d'un des appartements, aujourd'hui occupé par des bureaux et en profiter pour découvrir le vestibule d'entrée, les escaliers et la cage d'ascenseur, ainsi qu’accéder à la terrasse. C'était une immense chance, car l'immeuble n'est pas ouvert aux visites et comme pour bien d'autres intérieurs, le gardien en faction, en interdit toute photo. Je continue à penser que la connaissance, la culture et le patrimoine doivent être accessibles à tout le monde. C'est pour cela que je publie ces photos sur mon blog dans un optique de partage, comme l'ensemble de mes publications. 
L'intérieur de l'immeuble fait plus penser au baroque qu'au modernisme, dans son excès d’ornementations. Il est presque oppressant et probablement unique dans son genre. Les murs des espaces communs, tout comme ceux de l'appartement visité, sont recouverts de pièces céramique de Lluis Brù i Salelles et de sgraffites, de manière semblables que ceux de la façade arrière de l'édifice, rue Corcega. le travail du bois y est aussi très important, tout comme les vitraux qui ornent les fenêtres, les portes de l'ascenseur et de nombreuses portes à l'intérieur de l'appartement.

Je vous propose donc de m'accompagner dans cette visite. Nous fermons la grande porte en bois ajouré, avec des décorations forgés en forme de toile d'araignée et commençons par le vestibule, avec les murs recouverts de bois exotique et qui possède l'unique banc, dans la même matière, encore conservé dans une entrée d'immeuble moderniste.








Nous pouvons choisir de monter par l'escalier ou de prendre l'ascenseur, lui aussi tout en bois et vitraux.




A chaque étage, les portes de l'ascenseur sont en forme de chauve-souris et s'ornent de vitraux aux motifs différents.




Arrivés à l'étage, nous poussons une porte massive en bois sculpté, avec un immense œilleton et des poignées dorés.


La féerie et extravagance des parties communes se poursuite à l'intérieur. De longs couloirs, éclairés par des fenêtres avec des vitraux, mènent aux différentes pièces.


 Nous arrivons à la salle à manger d'apparat, qui s'ouvre sur la rue Corcega. Juste en face d'elle, une grande fenêtre qui a la même forme de chauve-souris que les portes d'ascenseur, ouvre sur une cour. Les murs y donnant ont été apparemment travaillés pour y recevoir des sgraffites, sans qu'ils n'aient jamais été peints. 



Avant d'accéder à la salle à magner, une insolite fontaine en céramique devait permettre aux convives de se laver les mains. 


 L'immense pièce, est séparée des salons adjacents, par des portes vitrées, ici encore, ornées de vitraux. Dont cette porte coulissante, avec une représentation féminine et une autre d'angelot.





Une colonnade entre laquelle reposent des vasques en céramique, donne sur des fenêtres, également décorés de vitraux, qui ouvrent sur la rue Corcega.





 Côté avenue Diagonal, se trouvent d'autres salons pour dames ou fumoirs pour hommes, avec des couleurs et motifs différents, selon le genre. Et de petits détails charmants, comme cet interrupteur électrique en forme de fleurs.



 Ici encore, les différents espaces sont séparés par de belles portes vitrées aux vitraux colorés.




Toutes les pièces y compris les couloirs, ont des plafonds peints, avec des sgraffites et des ornements céramique qui courent également sur le haut des murs.




Au niveau du sol, des plinthes en céramique recouvrent le bas des murs.



Nous terminons la visite, par une vue insolite du haut de l'immeuble avec le recouvrement en forme de chapeau d’Arlequin, tout en écailles céramiques vertes.